Voix bouddhistes – le Bouddhisme Shingon

Voix bouddhistes – le Bouddhisme Shingon

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retranscription de l’émission du 24 juin 2001 sur voix bouddhiste :

http://www.bouddhisme-france.org/archives/voix_bouddhistes/detail_des_emissions/010624.htm

Le bouddhisme Shingon appartient à la tradition du Vajrayana. Cette école qui s’est exclusivement développée au Japon est beaucoup moins connue en Occident que le zen, l’autre école de bouddhisme japonais. Pour présenter le bouddhisme Shingon, Voix Bouddhistes reçoit cette semaine le Révérend Yukaï. Dans l’interview réalisée pour le site, il revient sur les corps spirituels, qui jouent un rôle fondamental dans le bouddhisme Shingon, et précise le rôle de la pratique des déités courroucées.

Interview du Révérend Yukaï (*)
Les deux textes fondamentaux du Shingon sont le Kongochokyo et Le Dainichikyo

Voix bouddhistes – Quels sont les textes fondamentaux du Shingon ?

Révérend Yukaï – Il y a deux textes fondamentaux dans le Shingon, le Kongochokyo et Le Dainichikyo. Le Kongochokyo (c’est le nom japonais) parle du mandala du Kongokai qui développe plutôt le côté sagesse. Le Dainichikyo c’est plutôt le côté raison innée, la compassion.

Voix bouddhistes – Quels sont leurs noms en sanskrit ?

Révérend Yukaï – En sanskrit, le Dainichikyo s’appelle Mahavairocanasutra, et le Kongochokyo s’appelle Vajrasekharasutra. Pour le premier,  » maha  » signifie  » grand  » et  » Vairocana  » est le nom du Bouddha  » Vairocana « . On peut se reporter à l’ouvrage de Bernard Franck à ce sujet.

Dans le Shingon, l’univers lui-même est le Bouddha Dainichi Nyorai Voix bouddhistes – Vous avez mentionné à plusieurs reprises les corps spirituels. Pouvez-vous préciser ce dont il s’agit pour le Shingon ?Révérend Yukaï – Dans le Shingon, l’univers lui-même est le Bouddha Dainichi Nyorai (Mahavaroicana en sanskrit).

On parle des six grands éléments : la terre, l’eau, le feu, l’air et l’éther, et le sixième élément qui est la conscience.

Le grand mandala du Taizokai représente les cinq éléments matériels, qu’on appelle rupa, la forme. L’élément conscience, c’est à dire ce qui observe, c’est le Kongokai : c’est le sixième élément, c’est la conscience.

On peut représenter cela également sous la forme d’un stupa avec les cinq éléments. Le côté carré c’est la terre, le côté rond c’est l’eau, le feu c’est  » le petit chapeau pointu « , l’air c’est la demi-lune ou le bol, et la flamme c’est l’éther.

Les syllabes A Ba Ra Ka Kya correspondent aux cinq éléments. Derrière, il y a la lettre Bam qui est le symbole de la conscience.

Le premier mandala, le Dainichikyo, avec les syllabes A Ba Ra Ka Kya, correspond au côté matériel : c’est tout ce qu’on voit, tout ce qu’on perçoit directement sans même l’analyser.

Par contre quand on commence à réfléchir, on va faire des catégories et on va commencer à conceptualiser, ça va être le côté Bam, le côté réflexion et sagesse. On va essayer de commencer à sectoriser, à créer des lignes de force à partir desquelles on va commencer à dire : il est possible de faire ceci ou cela.

Le Shingon permet de faire un aller-retour de l’homme ordinaire au Dharmakaya, la vacuité, et du Dharmakaya au monde concret Voix bouddhistes – Quel est le lien avec les corps spirituels ?Révérend Yukaï – Ca c’est le Dharmakaya, c’est la grande vacuité. Ce sont les corps supérieurs qui sont sans forme et qui interpénètrent l’univers tout entier.

Ensuite vous avez le Sambogakaya, les corps de lumière, qui ont encore une forme un peu humaine, mais qui sont des corps d’énergie. Dans le Shingon, on explique comment on pénètre à l’intérieur de ces corps d’énergie, comment on les développe.

Le zen dit qu’il n’y a rien à dire : soit on est dans le monde du Nirmanakaya, donc dans le monde concret, soit on est dans la grande vacuité, et entre les deux c’est uniquement de l’illusion.

Tandis que dans le Shingon on va essayer d’expliquer tous les plans point par point jusqu’au moment où on rentre dans la grande vacuité. Ce qui nous permettra de faire une espèce d’aller-retour de l’homme ordinaire au Dharmakaya, la vacuité, et du Dharmakaya au monde concret, en cherchant à manifester Dainichi Nyorai dans le monde concret.

Nous avons tous la potentialité du développement des corps spirituels en nous, mais elle n’est pas encore complètement éveillée Voix bouddhistes – Il y a donc un corps intermédiaire, qu’on peut voir comme une spiritualisation du corps matériel, ou au contraire comme une matérialisation du corps spirituel ?Révérend Yukaï – Exactement. Et c’est pour ça qu’on considère qu’il y a de grands Bodhisattvas qui sont capables de se réincarner régulièrement de vie en vie. Il y a des corps spirituels qui sont très développés. Ces corps sont stabilisés. Par conséquent ces êtres de lumière vivent de manière pleine et entière dans ces niveaux là, si bien qu’ils peuvent s’incarner ou se manifester dans différents corps, éventuellement à différentes périodes, dans différents pays.

Nous avons tous cette potentialité en nous, mais elle n’est pas encore complètement éveillée. En fait, le Bouddha a très bien expliqué ces phases : d’abord développer les corps spirituels, supérieurs, et ensuite rentrer dans la grande vacuité.

Il y a l’idéal du Bodhisattva qui renaît, qui n’entre pas dans le Nirvana final, qui accepte de rester parmi nous. Il garde son Sambogakaya au lieu de l’auto-détruire et de finir de le dissoudre dans le Dharmakaya.

Pour un pratiquant qui n’a pas développé la vision pénétrante, les corps spirituels sont de l’ordre de la croyance Voix bouddhistes – Pour un pratiquant qui débute c’est de l’ordre de la croyance : il croit son maître. Pour un pratiquant qui avance, cela devient-il une réalité tangible ?Révérend Yukaï – Bien sûr. Il y a des corps de lumière, des corps d’énergie. Mais pour un pratiquant ordinaire, tant qu’on n’a pas développé la vision pénétrante, ce n’est effectivement que de l’ordre de la croyance.

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